lundi 27 décembre 2010

Plan du mémoire de master

CHAPITRE 1 : L’HOMME SELON ALAIN

1.1. L’animal humain

1.2. L’homme comme passions

I.3. L’homme comme esprit

CHAPITRE 2 : LA CONCEPTION DE LA SOCIETE CHEZ ALAIN

2.1. La société selon Alain

2.2. Le rôle de l’état dans la société

2.3. Le citoyen et la société

DEUXIEME PARTIE : LA FINALITE DE L’EDUCATION

CHAPITRE 3 : LA PHILOSOPHIE DE L’EDUCATION CHEZ ALAIN

3.1. La théorie de la connaissance

3. 2. Les agents de l’éducation

3. 3. La nature du sujet de l’éducation

3. 4. Le contenu de l’éducation

CHAPITRE 4 : LA FINALITE DE L’EDUCATION

4.1. La place de l’école dans l’éducation

4.2. Dressage et motivation

4.3. Volonté, désir et liberté

4.4. Formation à l’esprit critique

TROISIEME PARTIE : LA PEDAGOGIE SELON ALAIN

CHAPITRE 5 : LA PEDAGOGIE ALINIENNE

5.1. Contre la pédagogie du jeu et de l’intérêt

5.2. Contre les cours magistraux et le culte de la mémoire

5.3. La méthode sévère et le culte de l’effort

CHAPITRE 6 : APPROCHE CRITIQUE

6.1. Valeur de la pensée d’Alain

6.2. Quelques limites de la pensée l’Alain.

6.3. L’éducation à la liberté aujourd’hui

vendredi 4 juin 2010

ANTHROPOLOGIE AFRICAINE

par Suzie KENMOE

Introduction
Les questions sur l’homme ont depuis toujours été l’objet de grandes investigations scientifiques. Grands nombre de chercheurs se sont en effet investi sur cette problématique, afin de déterminer et de recevoir les caractéristiques spécifiques et particulières de l’humanité. La philosophie tout comme l’anthropologie font partir de ses sciences là qui donne une place prépondérante aux questions se rapportant à l’homme, sa vie, sa culture, ses habitudes, ses pratiques, ses mœurs… Pour ce faire, un certain nombre de penseurs et chercheurs philosophe, sociologue et anthropologues, ses sont regroupés en mettant à leur profit les enseignements des sciences de la nature et des sciences humaines pour tenter de cerner et de comprendre les caractéristique de l’espèce humaine et déterminer la position et la place de l’homme dans le monde face aux autres êtres vivants. Face à ce grand tournant de réflexion dans l’activité scientifique, l’Afrique n’est pas resté à l’écart car, en effet plusieurs études sur l’homme négro-africain se sont fait et continuent de se faire ; d’où nous avons l’anthropologie philosophique africaine qui, contrairement à l’anthropologie occidentale traite de l’homme africain en tentant de souligner et de relever sa position et ses caractéristiques spécifiques non seulement face aux autres êtres vivants, mais aussi et surtout face à l’homme occidentale. Ainsi, afin de comprendre ce qu’est l’anthropologie philosophique africaine, nous allons dans un premier temps, procéder à l’élaboration d’une approche notionnelle, des mots et des termes constituants l’énoncé de notre travail ; avant de procéder à l’étude même de l’homme africain en parlant tout d’abord de l’homme naturel ; puis de l’homme socio-politique ; et de l’homme historico-spirituel ; avant de finir par une critique de notre travail.


I APPROCHE NOTIONNELLE.
I.1. ANTHROPOLOGIE.
Le mot anthropologie vient du Grec (αυτρωπος): Anthropos qui signifie l’homme et (λογος) logos qui signifie discours sur. Etimologiquement anthropologie signifierait donc ‘’discours sur l’homme’’ ; discours ici peut être également remplacé par science. Et en tant que science, on quitte donc le domaine du juste et on cherche un discours bien ajuste non par à qui doit être, mais à ce qui est l’homme entant qu’homme, c'est-à-dire ce qu’il y a d’universel en chaque homme à travers la diversité des cultures.
Dans tous les cas l’anthropologie fait une grande place à l’histoire au devenir passé qui nous à fait ce que nous sommes. Elle est attentive à cette universalité qu’elle poursuit et à la recherche de l’origine de nombreuses variations culturelles que l’on observe.
L’anthropologie est donc la science de l’homme en général, elle s’efforce d’ajuster son discours à ce qui est pour expliquer l’homme, cet être de culture, dont l’essence est l’artifice (la culture est ce que l’homme ajoute à la nature) et la logique qui s’impose à lui comme une structure dont le mode est rationnel. Et comme méthode, l’anthropologie privilégie l’observation directe.
On distingue diverses anthropologies selon l’objet qu’elles étudient ; nous avons ainsi l’anthropologie physique (qui regroupe l’ensemble des sciences de la nature et qui étudient l’homme entant qu’animal), anthropologie social (études des institutions), l’anthropologie culturelle (qui étudie les croyances, les mœurs, les techniques propre à tels ou tels groupe humain) et l’anthropologie philosophique que nous analyserons dans les lignes ci-dessous.

I.2. ANTHROPOLOGIE PHILOSOPHIQUE
L’anthropologie philosophique représente de façon générale le courant de pensé fonder en Allemagne dans les années 1920 et 1930. C’est un courant de pensée qui réunissait et regroupait philosophes anthropologues et sociologues ; ce mouvement eu une influence déterminante dans le paysage intellectuel allemand du XXe siècle. Se fut avant tout un tournant anthropologique décisif en philosophie (critique de la tradition idéaliste et du dualisme cartésien au profit d’une conception de l’homme comme unité physique et psychique) et se fut également une réponse aux apories de l’historisme allemand. Le fondement de sa démarche fut de mettre à profit les enseignements des sciences de la nature (biologie, zoologie, éthologie paléo anthropologie etc.) et des sciences humaines pour tenter de cerner les caractéristiques de l’espèce humaine, sa position spécifique dans le monde face au règne minéral, végétal et animal.
I.3. ANTHROPOLOGIE PHILOSOPHIQUE AFRICAINE
L’anthropologie philosophique africaine représente d’une manière générale le courant de pensée africain réunissant plusieurs chercheurs. Nous y retrouvons des philosophes, des anthropologues et des sociologues traitant des questions se rapportant à l’homme noir, l’homme africain.
Ces penseurs traitent en effet de toutes les questions touchant l’africain dans tous ses différents aspects ; ils analysent ainsi les questions touchant la culture, les traditions, les rites les croyances, les coutumes et les mœurs de l’homme africain.
Le but de cette démarche qu’est l’anthropologie philosophique africain est de cerner les caractéristiques spécifiques de l’africain afin de déterminer sa position spécifique dans le monde et par rapport aux autres êtres humains qui constituent l’ensemble de l’humanité.
Notons aussi que l’anthropologie philosophique africaine n’est pas l’apanage exclusif des penseurs d’origines africaines ; nous y retrouvons un grand nombre de penseur occidentaux qui traitent des questions se rapportent à l’anthropologie philosophique africaine. Tel est par exemple le cas du révérend père placide Temples qui dans ses investigations à entrepris grand nombre recherches concernant l’homme africain.

II L’HOMME NATUREL
Depuis le fameux « homme connais toi toi-même » de Socrate, le débat de la philosophie est recentré sur l’homme. Chercher à le connaître dans sa totalité et non d’une manière parcellaire comme ont fait les sciences dites exactes, reste la noble préoccupation du philosophe. La définition de l’homme semble de plus en plus ambiguë quand on y porte son attention. L’apport de la pensée africaine semble ne pas nous faciliter la tâche. Il nous faut tout de même entrer dans ce labyrinthe pour déterminer les éléments essentiels à la définition du composé humain. Pour y arriver, nous attellerons à présenter les conceptions des anthropologues, celles de certains peseurs africains, avant de préciser ce qui constituerait l’homme dans l’Afrique, malgré la pluralité des appellations.

II.1. CONCEPTION DE L’HOMME D’APRES LOUIS VINCENT THOMAS
Anthropologue européen, Louis Vincent Thomas s’est particulièrement penché sur la conception de la personne en Afrique dans son livre la terre africaine et ses religions il étudie les éléments constitutifs de la personne dans plusieurs ethnies. Celle qui retient notre attention est la personne telle que comprise par les Yoruba, qui est ensemble composé de sept éléments que nous pouvons regrouper en trois grands groupes : les composantes matérielles ; les composantes immatérielles et périssable ; les composantes immatérielles et impérissables.

II.1.1. Les composantes matérielles
Chez les Yoruba, elles sont au nombre de trois : le corps, l’ombre, l’intérieur du corps
Le corps : partie intégrante de la personne, elle est fait de matière périssable : l’argile. C’est lui qui signifie la présence de l’home au monde. Il est soumis aux besoins de la nature : manger, boire, force de la pesanteur etc. il devient poussière quelque temps après la mort.
L’ombre c’est elle qui accompagne le corps : il s’appelle : l’ O JI JI Louis Vincent Thomas nous apprend qu’elle ne périt qu’après l’inhumation du cadavre. Elle est étroitement liée à la personne, qu’ « agir sur l’ O JI JI, c’est viser la personne dans son unité »[1]
L’intérieure du corps appelé IKPIN-I JEUN est le centre de distribution de la nourriture ; or qui dit nourriture, appelle le périssable.

II.1.2. La composante immatérielle périssable
Elle est réduite à l’IYE qui se traduit en français par esprit. Il est localisé dans la tête derrière le front. L’ IYE est distinct de l’intelligence, de la réflexion. Chez les Yoruba, l’homme perd son esprit dans la folie.

II.1.3. Les composantes immatérielles et impérissables
Comme les composantes matérielles, nous distinguons trois composantes immatérielles et impérissables : la tête, le souffle, le cœur.
La tête
différente de la partie physique du corps, la tête ici est une partie impérissable qui se réincarne dans le nouveau né d’une lignée que les ancêtres de la lignée appellent à la vie. Cette composante est appelée l’ORI ou OLORI.
Le souffle
Appelé EMIN, c’est le souffle vital qui fait mouvoir le corps. Il quitte celui-ci dès qu s’arrête la respiration et sa destinée est de retourner rejoindre celui a qui il appartient : l’ÊTRE SUPREME.
Le cœur
Encore appelé OKAN, « c’est l’instance la plus représentative de la personne dans sa totalité »[2] Différent de la partie biologique connu de tous, le cœur ici est considéré comme le siège par excellence de la personne comme valeur. C’est d’ailleurs lui qui marque la différence essentielle entre les hommes.

II.2. LA CONCEPTION DE LA PERSONNE DANS L’ANCIENNE EGYPTE
Dans l’ancienne Egypte, entendu comme l’Egypte de la période pré pharaonique et l’Egypte pharaonique, les égyptiens reconnaissent déjà à la personne humaine un tout indivis mais composé de neuf éléments[3] que nous rangeons dans trois grandes catégories.

II.2.1. La composante matérielle
Le KHAT ou le corps physique, est l’unique composante matérielle de l’homme. Il est périssable et dégénère après la mort.

II.2.2. Les composantes immatérielles et impérissables
Le AKH ou AKHOU c’est l’esprit lumineux et impérissable du défunt
Le BA ou esprit ou encore âme quitte celui-ci après que le corps soit mort.

II.2.3. Les composantes immatérielles et périssables
Le KA c’est la force vitale qui n’est utile pour l’homme que lorsqu’il est en vie. c’est elle qui soutien et garde en vie l’homme. Elle le quitte juste avant la mort.
Le IB ou AB c’est le cœur, le siège de la pensée qui n’est opérationnelle lorsque toutes les facultés de l’homme sont encore vivantes.
Le KHAIBIT ou le SHOUT c’est l’ombre qui accompagne le vivant et ne le quitte qu’après sa mort.
Le SEKHEM traduit par puissance, dit l’autorité du vivant qui s’anéantie après la mort.
Le REN se traduit par nom : différent de l’étiquette, « c’est l’élément fondamental de la personne (…) il assure la spécificité du moi et le prononcer c’est agir sur l’être »[4] du porteur de ce nom ; il exprime aussi tout un programme de vie, voire même la vocation du porteur.
Le SAHOU ou corps éthérique.
II.3. LA CONCEPTION RWANDAISE DE L’HOMME
En kinya Rwanda langue dans laquelle nous voulons dire les composantes de l’homme, nous énumérons cinq composés qui suivant la logique des autres africains peu être regroupés en trois grands groupes.

II.3.1. Le composé matériel
UMUBILI ou corps c’est l’instance de la perception. Il ne dit pas la totalité de l’homme encore moins l’être. Comme toute matière, il dégénère après la mort.

II.3.2. Les composés immatériels et périssables
IGICUCU c’est l’équivalent de l’ombre ou du vocable idiot dans la langue française. Il est le compagnon fidèle de l’homme le long de sa vie. Il est si intimement lié à lui que le viser c’est directement attaquer l’homme. L’ombre disparaît après la mort du corps.
UBUZIMA c’est la vie ou la santé. Que ce soit l’un ou l’autre, les deux sont éphémères, fugaces.
UBWENGE traduit par connaissance, et habileté, cette composante ne détermine pas l’homme puisqu’il se sépare de lui avec la folie ou la mort.

II.3.3. Le composé immatériel non périssable
MUTIMA imparfaitement traduit du kinya rwanda, ce vocable très riche de sens signifie cœur. Loin d’être l’organe biologique, c’est ce qui caractérise l’homme dans sa vie affective, volitive, intellectuelle, conscience, personnalité, bref c’est ce par quoi un homme est lui-même pas un autre.[5] Il se trouve harmonisé et unifié dans la mesure où il a un cœur. « kanaka agira umutima » (un tel possède un cœur) par exemple, suffit pour présenter l’homme.

II.3. DE L’IDENTITE DE L’HOMME EN AFRIQUE
Au vu de ce qui précède, nous réalisons qu’en Afrique pour les cas interrogés, et partout d’ailleurs, il ressort clairement que la conception de l’homme n’est pas dualiste comme en occident. Dans les différentes ethnies, nous rencontrons des composantes plurielles qui ne diffèrent que de l’appellation. Ce qui est remarquable, c’est qu’il y a une toile qui unit et résume ces différentes manières compréhensives ou extensives. En Afrique, la personne humaine est un ensemble de trois composés :
Le composé matériel qui est périssable que nous pouvons traduire par le corps ou la chair.
Le composé immatériel périssable qui se sépare de l’homme avec la mort tout en se perdant il accompagne l’homme le long de sa vie terrestre
Le composé immatériel impérissable qui peut se traduire par l’âme, ou par un organe, mais cette fois ci compris par opposition a ce qui peu connaître la corruption de la chaire.
Notons qu’avant nous les auteurs comme Hebga ont travaillés dans ce sens et ont trouvé aussi une conception triadique de l’homme en Afrique. Nous n’avons pas travaillé dans ce sens à cause du fait que c’est déjà réservé à un groupe d’exposé. Aussi, Ibrahim Sow dans son ouvrage intitulé psychiatrie dynamique africaine, dégage les schémas « nosologiques traditionnels » de l’homme qui se résume en trois : le corps et le système végétatif ; le principe vital ; le principe spirituel[6]

III L’HOMME SOCIO-POLITIQUE
III.1. L’HOMME SOCIAL
III.1.1. Originalité et fondement
L’originalité du fait social négro-africain est liée à la pluralité de la personne. En d’autres termes, c’est le pluralisme qui fait l’originalité des relations du négro-africain. Puisqu’il y a pluralité de la personne africaine, il y a aussi diversité de relations. Dans Notion de la personne en Afrique noire, il est écrit que : « le pluralisme de la personne africaine implique par conséquent une pluralité de type de relation »[7]. Par ailleurs, ce pluralisme est également un des fondements des relations entre africains.
Selon Tempels, « la force vitale »[8] est la caractéristique de la personne africaine. Cette force ou sagesse intérieure est une dynamique qui pousse l’africain à aller vers les autres. En effet, la personne africaine, est très riche pour se borner à un pur renferment sans répandre cette force-sagesse autour de lui. Il éprouve un profond désir de communiquer ce qu’il possède de précieux : la force intérieure, la maîtrise de soi, la sagesse.
Chez les Moundang par exemple, écrit Henri Maurier, « il existe encore une autre sorte de principe spirituelle dans la personne humaine, nommé Masen-byane dieu de la naissance. Cette instance douée d’une intentionnalité propre n’est pas un ange gardien (…) ce dieu est un destin inscrit dans la paume de la main. Il est donné par le créateur lui-même au moment de la conception »[9]. Ainsi parmi les instances de la personne africaine, l’on retrouve des instances spirituelles qui stimulent l’homme à la vie relationnelle.
« Le fondement de ce dynamisme c’est la nécessité des relations droitement vécues pour l’obtention de la réussite des personnes et de leur groupe. Les personnes sont équipées (éduquées) pour la vie relationnelle qui fait prospérer et en même temps tout à fait capable de détruire et de rendre impossible la relation qui fait vivre »[10]. L’expérience africaine aboutit en définitive à une théorie d’ensemble : la vie relationnelle comme une manière authentiquement africaine. Ainsi donc, non seulement le pluralisme africain est au fondement de l’originalité de la vie sociale, mais il est aussi au fondement de la diversité de types de relations.

III.1.2. Diversité de relations
III.1.2.1. Rapports entre les vivants
Le groupe est perçu comme seul pourvoyeuse de sécurité nécessaire au déploiement de l’existence. P. il n’est abusif écrit L.V Thomas « d’avancer que c’est le groupe dans sa totalité qui prend en charge la formation de la personnalité : famille étendu, lignage, classe d’âge, société initiatique, associations diverses. L’éducation est d’ordre relationnel, mais cette relation d’emblée se fait collective : symbiose avec la mère »[11]. De ce qui précède, c’est donc ainsi que le groupe ou société contribue à la formation intégrale de la personne.
En Afrique hors du milieu social, la vie n’a aucun sens. La vie n’a effectivement de sens que dans les rapports sociaux. Au sein de ces rapports, l’un ne peut vivre qu’avec l’autre, par l’autre, pour l’autre et en constante référence à l’autre. D’après Pierre Erny, « toute l’éducation vise à faire participer l’individu à la vie de son groupe et on ne conçoit pas qu’il puisse prendre son propre destin en main. (…) Une culture édifié sur la prééminence de la vie collective va normalement privilégier les aspects de l’éducation qui y prépare ou en découlent »[12].
Dans certaines sociétés africaine exemple chez les Beti du Cameroun, l’homme est défricheur et la femme agricultrice. Car la femme est donneuse de vie. Dans ce type de relation entre l’homme et la femme, chaque partenaire est positionné dans un statut et un rôle distinct, lesquels ne peuvent fusionner. Le rôle de l’un ne se comprend que par référence au rôle de l’autre. Cet exemple schématique nous introduit dans le type d’éducation en Afrique. Une éducation qui se déroule principalement dans le strict respect de la personne.
En Afrique noire, la société a pour rôle de prendre en charge la formation, l’éducation de l’enfant. Selon L.V. Thomas, « l’éducation négro-africaine apparait avant tout comme une intégration ; il s’agit de faire passer le nouveau-né du cosmique à l’humain et au social : d’où la double nécessité de l’identifier (d’où vient-il ? qui est-il ? quels noms faut-il lui donner ?) et de lui conférer un statut de personne non seulement en soi mais encore et surtout pour autrui et par rapport à autrui »[13]. (En Afrique plus qu’ailleurs l’être est l’être-pour-autrui selon l’expression sartrienne).
Les relations sociales négro-africaines ont pour socle et fin la fraternité. statut humain tout d’abord (culturisation) et statut d’adulte ensuite. Cette formation de la personne s’effectue à travers des étapes telles que la circoncision et l’excision. Ces opérations rendent le mariage (socialement) possible, ces opérations rituelles sont non seulement créatrices de la famille et de la communauté mais encore introduisent une enculturation (sélective) complémentaire à la fois instruction et formation de la personne. Par ailleurs, la perte de la perfection première physique et spirituelle, doit être compensée par un épanouissement sur le plan social et culturel.
Dans la société occidentale, la famille est réduite à une cellule restreinte généralement père mère et enfant. L’enfant qui y grandit, développe facilement des sentiments d’amour et de haine, de dépendance et de rivalité. Ainsi l’on voit se multiplier des affrontements surtout aux périodes critiques. Or dans la société africaine, l’enfant établit des relations avec un grand nombre de personnes ; s’enrichissant par conséquent de ces contacts avec les autres. Ce qui permet de ne pas trop s’attacher à une seule personne et ce qui permet du même coup d’éviter au maximum des conflits. Les conflits sont noyés dans la masse par un vaste réseau de communication où dont les moyens sont également divers.



Les moyens employés pour la réalisation de la vie sociale
Par opposition à « l’optique occidentale qui privilégie l’intention, la pensée, l’idée, l’image doit faire place dans la vision africaine à une optique qui privilégie la corporalité du symbolisme : attitudes corporelles, vêtements, objets présentés, travaux exécutés par quoi se réalise la visibilité des relations »[14].
La problématique africaine est celle de la vie ensemble. La vie ensemble étant faite de relation interpersonnelle, le symbolisme est étudié dans la perspective relationnelle. La relation s’exprime, se vit et se réalise ainsi dans les activités (telles que) : vivre en frères ou vivre la fraternité, ce n’est pas seulement ressentir cela intérieurement, l’exprimer imaginativement ou conceptuellement dans son for interne ou extérieurement dans des termes de parenté. C’est aussi se situer pour toutes sortes d’actes, de services, de prestation selon une norme qui définit le groupe.
En Afrique noire dans le domaine relationnel, le symbole est une valeur d’échange dont la signification atteste une règle d’échange ou d’obligation mutuelle. Dans le principe du symbolisme, deux idées sont à retenir. D’une part, la liaison mutuelle entre des éléments dont la combinaison est significative. Et d’autre part, l’effet du symbolisme est la liaison mutuelle entre des sujets qui se reconnaissent engagés l’un à l’égard de l’autre dans un acte, une alliance, une loi fidèle. S’arrêter au niveau du symbole, n’est pas restituer suffisamment l’expérience relationnelle africaine.
La parole comme moyen de communication
Le langage occupe une place importante dans la société africaine. En effet, « la parole situe l’homme dans le groupe, lui assigne une place, lui octroie une fonction ou un rôle : chacun dans la société est considéré en fonction de sa parole individuel et y suit, (…) le chemin qu’elle lui trace. L’autorité appartient à celui qui sait parler avec sagesse et taire avec discernement »[15].
Chez les Dogon par exemple, la parole a une réalité propre. Elle est une sorte de double de la personnalité et une manifestation humaine fondamentale. « La parole est comme la projection sonore dans l’espace de la personnalité de l’homme »[16]. Autrement dit, la personne se donne dans sa parole. La parole récapitule la personne.
Toute parole est communication, mais toute communication n’est pas parole. La parole étant la communication entre deux ou plusieurs personnes peut être vue comme la grande technique de la relation entre les personnes. Ici la parole n’est pas à comprendre comme expression de la pensée, mais comme outil de communication. La bonne parole est celle qui soude les relations. Elle est la semence qui féconde les rapports sociaux. Enfin, la parole qui tisse les relations rend les personnes heureuses, fortes, robustes. Sans parole, on n’est pas des hommes en communauté.
III.1.2.2. Les rapports entre les vivants et les morts
En Afrique noire, en dehors des relations entre les êtres humains, les hommes entretiennent aussi des rapports avec les morts.
Les rapports des morts et des vivants en tant que système de relations, présentent des aspects variés qui vont de la dépendance unilatérale à l’échange mutuel de service : les vivants, par leurs offrandes, apportent la nourriture aux morts et les morts, par leur savoir et leur puissance, protègent les vivants contre le malheur et la maladie, leur prodiguent les sages conseils, leur facilitent l’actualisation de leurs projets. Le but de la relation est donc principalement l’échange mutuel des services..

III.1.3. Autres rapports
En plus des relations entre les vivants d’une part et entre les vivants et les morts d’autres part, les africains entretiennent diverses types de rapports avec des objets différents. En effet, l’africain entretien des liens avec le génie, le totem etc. Parfois il existe des rapports privilégiés avec un animal. Il peut se faire encore que le Moi ait des rapports privilégiés avec soit le placenta, soit le cordon ombilical qui furent les siens. Ces différents rapports sont très importants parce qu’ils lui garantissent la protection, le bonheur et la paix.

III.2. LA FINALITE DE LA SOCIETE ET L’ORGANISATION POLITIQUE
La société est fondamentale pour la détermination de la personne. Pourquoi l’homme est un être socio-politique. La pluralité ontologique est un fait spécifiquement négro-africain. Et ce fait spécifique est en même temps à la base de la sociabilité et de l’organisation politique africaine. Et cette pluralité explique le fait que l’africain soit un être de relation et explique aussi la pluralité de relation.
La finalité pour laquelle la personne négro-africaine est un être de relation est principalement que, la société est fondamentalement pour la détermination pour la formation de la personnalité. Grace à la société, l’individu se reconnait comme sujet unique (par le passage par différents rites) à travers la pluralité des éléments constitutifs d’origine diverse. A travers la société, l’individu se reconnait également comme sujet permanent à l’aide à l’aide de la multiplicité successive des étapes de la formation.
La pluralité de la personne africaine est l’originalité et le fondement de la vie sociale et politique. La société en Afrique, loin d’être un pur communautarisme ou un simple socialisme au sens occidental du terme, est plutôt un appel qui entraine l’africain à se dégager de ses velléités individualistes et d’une simple solidarité limité à cadre très restreint. En outre, l’africain perçoit l’autre comme un être libre investi d’une dignité qui s’enracine dans un certain absolu ou toutes les différences sont transcendées. L’africain, un être relationnel signifie en d’autres termes que chaque membre du groupe doit se parfaire et s’accomplir en symbiose. Ayant déjà analysé les différent composants de l’homme africain, et bien que ces composants forment une unicité, nous devons souligner ici le rôle de la dimension spirituelle dans les relations, la vie sociale africaine ? La personne africaine unique et singulière est fortement une centre spirituel relationnel émerge en ouverture aux autres êtres humains ses semblables, ce qui fonde l’une des caractéristiques, des spécificités fondamentales de la personne africaine.
La spécificité du fait social africain s’explique à partir des différents composants de sa personne. Si l’africain est un être essentiellent relationnel cela vient du fait même de sa structure pluridimensionnelle. En terme d’autre c’est parce que l’homme est composé de plusieurs éléments qu’il est foncièrement un être de relation. C’est absurde où est le lien ? Nous pouvons simplement affirmer que la pluridimension de la personne africaine qui spécifie le fait social en Afrique. Le fait social de manière général se fonde sur ce qui est propre à l’homme seul c’est-à-dire la raison. C’est donc sur la raison unique à l’homme que l’on parvient à faire la distinction entre le fait social humain et la vie en société des animaux.
Lorsqu’on parle de l’africain, on voit avant tout un être de relation. Il faut souligner que ce profond désir de relation avec ses semblables chez l’africain est caractéristique de sa volonté de s’intégrer dans les réalités sociales où les liens de solidarité ne sont pas seulement de sang, de clan, mais de l’ordre de justice de paix et d’amour.

IV L’HOMME HISTORICO-SPIRITUEL
Après l’analyse de l’homme inséré dans le monde et comme être de relation, nous abordons sa troisième dimension qui est celle de l’homme historique et spirituel. A quoi renvoie cette dimension de l’Africain ? En fait, c’est dans l’histoire que se manifeste et réside l’esprit qui habite la personne vivante et c’est l’esprit qui est le principe moteur de chaque personne. Cette étude sera basée sur la réflexion sur le nom, les rites d’initiation et la religion en Afrique.
IV.1. La dimension historique
.Le nom comme critère définissant l’histoire de l’africain
Selon le Dictionnaire de poche, le nom est un mot désignant un être vivant ou une chose .Il est commun quand il désigne une chose appartenant à une même catégorie, le nom est dit propre lorsqu’il désigne un être unique et c’est dans ce cas qu’est situé le nom de la personne qui nous concerne plus dans ce travail.
En effet, chaque contexte a son propre système conventionnel d’appellation qui peut donner un aperçu sur des aspects de sa culture en indiquant certaines perspectives et valeurs sociales. Dans beaucoup de sociétés traditionnelles en Afrique, le nom avait une plus grande signification que les simples étiquettes. Les noms de famille pourraient être des indices des occupations du groupe familial à l’origine. De plus il exprimait la nature individuelle de l’être.
Tempels, premier à penser sur l’existence de la philosophie africaine, n’a pas hésité d’y accorder une place de choix pendant son étude. Il estime que le nom « est la réalité même de l’individu »1. Le nom est la spécification de la personne, il est lié à elle et, par conséquent, il ne peut être modifié. Il est une partie intégrante de son identité. Il peut se rapporter à des événements entourant le début d’une vie ou décrire quelques caractéristiques ou potentialités que la famille croit déceler chez cet individu ou espère le voir manifester.

Ainsi le nom joue un double rôle à savoir : de même qu’il sert à distinguer telle personne parmi les autres, qu’il constitue un souvenir des circonstances dans lesquelles celui qui le porte est né . Il peut être imposé en souvenir d’un ancêtre honorable ou d’un personnage historique, le nom contient aussi des éléments qui indiquent le sexe de la personne ainsi que ce dont la personne est capable.
Selon Vincent Thomas, « les techniques de dénomination tiennent une place de choix dans la constitution de la personne »2: il dévoile l’essence de la personne, ainsi, « prononcer… le nom c’est agir sur l’être »3, il exprime sa vocation ; le changement du nom entraîne la disparition de la personne.
Ceci explique la réaction de certains américains. Bien que quelques esclaves africains fussent désignés par les noms africains, beaucoup d’entre eux fussent immédiatement rebaptisés par leurs propriétaires blancs sous prétexte de commodité. Ils les coupaient de leur identité propre et leur imposaient une nouvelle identité, symbolisée par le nom nouveau. Certains accueillirent ce traitement mais d’autres refusèrent dont en voici un témoignage : Mademoiselle Angelu n’accepta pas d’être appelée autrement que par son nom […] et d’avoir son identité déniée, aussi abandonna-t-elle le travail plutôt que de se soumettre à la tentative de dépersonnalisation dont elle avait été victime »4.
En Afrique, le nom est le premier symbole de l’identité de la personne. Il indique l’individualité ontologique de l’être. Chez les Africains, l’homme n’apparaît jamais comme un individu isolé et indépendante, il est un individu clanique. Et c’est à travers le nom que la personne est reconnue et distinguée d’une autre. Le nom, non seulement, révèle l’histoire et l’essence même de la personne mais encore est la sauvegarde de l’histoire de toute une communauté et de ses valeurs éthiques.

IV..2. La dimension spirituelle de l’Africain
IV.2.1. . Les rites d’initiation

En Afrique, la destinée de l’homme est l’union avec la divinité. Pour l’atteindre, il faut passer par des rites d’initiation qui consistent à : avertir l’homme de cette valeur transcendante, de lui faire connaître son origine et sa nature et lui montrer les rouages (enchaînements) de son existence.
En Afrique, l’être humain non encore initié est considéré posséder par un porte-malheur de l’ignorance de soi et de son origine, de la stérilisation et les malformations aussi bien physiques que spirituelles. Ce porte-malheur est un obstacle à la maîtrise de soi et à l’intelligence du sens de la douleur. Le wâzo* est à combattre par tous les moyens si l’on veut être un homme véritable car « il comporte d’autres obstacles à l’épanouissement de la personne »5. C’est le rite qui assume ce rôle est primordial pour la pleine valorisation de la personne : il « dévoile le sens de l’existence de l’homme »6, il détermine comment doit se réaliser la personne, il achève la formation morale et intellectuelle. Le rite d’initiation redonne à l’homme son harmonie originelle et réalise une union mystique avec Dieu. Le cérémonial du korè se consacre à l’exaltation de l’homme tendu vers la conquête de la suprême sagesse et de l’immortalité. L’homme qui a subi toutes les épreuves de l’initiation : voilà l’homme accompli, adulte sur qui la société peut compter pour les tâches importantes à assumer. Il est entré dans la vie et fait partie de l’assemblée des sages.
Bref, le rite « permet au sujet qui le subit d’accéder aux formes les plus hautes de la spiritualité créatrice »7

IV.2.2. L’homme africain et l’absolu
La question de Dieu en Afrique fait l’objet de discussion : pour les uns, l’Africain est un homme religieux et non athée, pour d’autres l’Africain ne s’est jamais préoccupé de l’idée de Dieu. Quelques illustrations feront notre contribution à ce débat.
En effet, comme exprimé ci-dessus, chez les Africains en général l’homme est en relation avec Dieu à travers des rites. Selon Charles Atangana, c’est à partir du moment où Dieu s’est éloigné d’eux que les Beti ont eu l’idée d’instituer des rites pour les rapprocher de celui qui les avait abandonnés. Par les rites, les Fang se purifient de leurs fautes pour établir la paix dans les cœurs des membres de la tribu, ils se préparent à recevoir le secours et l’aide de Dieu et le rencontrer. Dieu est donc celui qui, dès l’origine prend plaisir à vivre parmi les hommes8.
De plus, Bahoken relève les attributs par lesquels les Africains reconnaissent Dieu. Il est créateur et bon. Il est écrit à ce propos « tout l’univers, écrit- il, tend vers Nyambe (Dieu) qui le meut par son caractère de suprême bonté et de suprême acte »9.
La croyance africaine en Dieu et sa conception se fondent sur l’existence de l’univers, celle du premier moteur du premier moteur, le créateur du monde à partir de son acte. Selon Bahoken, le monde et Nyambe sont des réalités et non seulement des idées ni de virtualités.
Comme il n’y a pas d’effet sans cause, il n’y a pas non plus de monde sans Nyambe pour les bantu. De part sa perfection, Dieu est le plus grand que tous les autres êtres. Pour être en contact avec lui, il faut la foi et ainsi une expérience personnelle car on ne peut pas prouver l’existence de Dieu. La seule chose qu’on puisse dire de lui c’est qu’il est Dieu.
Selon Vincent Mulago, Dieu est en relation avec les hommes à travers les esprits. Il écrit : « Nyamuzinda est essentiellement bon mais il existe entre lui et les hommes des Bazimu. Ce sont ces derniers qui influencent immédiatement la vie. Avec Nyamuzinda, l’homme peut et doit avoir les moyens de s’attirer la bienveillance de esprits et de décliner leurs coups »10. Mveng Engelbert, quant à lui, stipule que Dieu est la lumière éclatante, auteur des lois et commandement que l’homme doit suivre pour son bonheur.
Une autre illustration de l’idée de Dieu dans la vie de l’homme africain c’est dans la culture rwandaise. Et là nous partons du témoignage de Nothomb qui écrit : « …à mon tour, après tant d’autres Européen arrivant au Rwanda je n’ai pu ne pas être impressionné par la place qu’occupe Dieu dans la culture rwandaise »11. D’après son témoignage, cette place se remarque à travers beaucoup de noms des personnes. Etant donné le sens du nom Dieu « Immana », plusieurs noms contiennent ce mot comme suffixe : C’est le cas de « Habyarimmana », c’est Dieu qui engendre, « Hahingimmana », c’est Dieu qui cultive…
De même dans le langage courant, on rencontre souvent des expressions comme « Immana ikulinde », que Dieu te protège.
Comme ailleurs dans le monde, l’africain manifeste sa croyance en Dieu par l’appartenance à une religion. Cette dernière a une grande influence sur la société africaine. Mais en Afrique, il n’y a pas qu’une seule religion. L’animisme, religion primitive, considère tous les êtres comme vivants et intentionnés. Cette religion est sans clergé sinon le responsable de la famille. Selon J. Ki-Zerbo, les animistes croient en un Dieu absolu et suprême. Ce dernier n’est invoqué qu’en des circonstances particulières, lorsque les autres dieux restent impuissants. Ces dieux sont des objets ou fétiches. Les gens croient qu’ils ont des vertus bénéfiques sur ce qui les portent ou maléfiques dans certains cas. « Si vous leur demandez d’où vient cette force, cette activité, ils vous répondront que c’est Dieu (Nyamuzinda) lui-même qui l’y a mise »12.
En somme, la dimension historico spirituelle de l’Africain se manifeste par le nom, les rites d’initiation et le rapport avec le créateur… Non seulement le nom fait partie de l’identité de chacun mais encore il l’intègre dans la lignée de ses ancêtres, renseigne sur les circonstances dans lequel l’homme bien déterminé est né et même sur son génie. Changer le nom d’un Africain c’est lui retirer son identité et le diminuer son essence. L’Africain se distingue aussi par des rites sans lesquels l’homme reste un enfant et non accompli. L’Africain attend sa fin en Dieu qu’il n’invoque qu’après l’impuissance des esprits qui sont des intermédiaires entre l’homme et Dieu. Cette réflexion sur l’homme africain n’est pas exhaustive.

CRITIQUE
Bien qu’il procure à l’homme des avantages, le pluralisme africain est aussi à l’origine de certaines difficultés. En effet, dans la relation de l’africain avec ses semblables, le relationnisme caractéristique de la personne africaine est un refus de la reconnaissance de l’identité personnelle et individuelle de la personne. Car la multiplicité de relation engendre inévitablement la perte su sens profond du moi. Cette identité se dissoud dans le vaste réseau de relation.
En outre, la société négro-africaine ne favorise pas beaucoup la créativité individuelle. Les grandes décisions ou les décisions importantes par exemple ne concernent pas uniquement une personne à savoir le chef, mais elles engagent et concernent toute la société. C’est pourquoi écrit Maurier : « la tradition qui favorise l’ordre et la sécurité ne favorise pas la puissance inventive et le goût du risque »[17].

CONCLUSION
Pour conclure notre travail, rappelons qu’il était question de l’anthropologie philosophique africaine. Il ressort donc après analyse que ce thème est aussi vaste que l’Afrique elle-même et dans sa diversité culturelle. Cet exposé ne prétend guerre l’avoir épuisé dans sa totalité. Nous avons plutôt essayé autant que possible un substrat de fond de base non pas exhaustif, mais susceptible néanmoins de permettre de comprendre la personne négro-africaine. Ce qui est fondamental dans l’anthropologie philosophique africaine, c’est la pluralité de la personne. Afin de mieux étayer ce concept (pluralité) l nous sommes d’abord partis de la définition des termes, ensuite nous avons analysé la personne africaine comme être naturel, puis comme un être socio-politique et enfin comme un être histotico-religieux. De ces différentes parties, l’idée principale est que : « la notion de personne résume et cohère les idées-forces de la pensée négro-africaine traditionnelle. On y retrouve, en effet, l’exigence de pluralisme, les réseaux de participations et de correspondances qui relient le sujet au groupe et au comos, les dimensions verbales, le dynamisme et l’inachèvement, la richesse et la fragilité, le rôle important dévolu au milieu et la référence inévitable au sacré »[18].
BIBLIOGRAPHIE

L. V. Thomas, Terre africaine et ses religions, Larousse, université, série anthropologie, sciences humaines et sociale, paris, 1975.

D., Nothomb, Un humanisme africain valeurs et pierres d’attente, Lumen Vitae, Bruxelles, Washington, 1965.

I. Sow, psychiatrie dynamique africaine, Paris, Payot, 1977.

S. Azombo, P. Meyongo, précis de philosophie pour l’Afrique, Fernand Nathan, 1981.

Oum Ndigi, cours Egyptologie, Université Catholique d’Afrique Centrale, Institut Catholique Yaoundé 2008, inédit.

TEMPELS P., La philosophie bantoue, Paris, Présence africaine, 1949.

SHEILA S. WALKER, Noms et identité chez les noirs américains. Article publié sur http://WWW.refer.sn/ethiopiques du 7 sept. 2OO8.

J. Ki-Zerbo, Tradition et modernisme en Afrique noir,thème de la conférence internationale de Bouaké, 1962, cf. numéro spéciale des images de Toumliline, mai-juillet, septembre 1962.
Henri Maurier, Philosophie de l’Afrique noire, Anthropos-Institut e.V, St Augustin, Bonn, 1985.
Pierre Erny, L’enfant et son milieu en Afrique noire, L’Harmattan, Paris, 1987.
[1] L. V. Thomas, Terre africaine et ses religions, Larousse, université, série anthropologie, sciences humaines et sociale, paris, 1975, P.52.
[2] Ibidem
[3] Cf. Oum Ndigi, cours Egyptologie, Université Catholique d’Afrique Centrale, Institut Catholique Yaoundé 2008, inédit.
[4] S. Azombo, P. Meyongo, précis de philosophie pour l’Afrique, Fernand Nathan, 1981, P.54.
[5] D., Nothomb, Un humanisme africain valeurs et pierres d’attente, Lumen Vitae, Bruxelles, Washington, 1965, P. 24.
[6] I. Sow, psychiatrie dynamique africaine, Paris, Payot, 1977 PP. 82-83.
[7] In Notion de personne en Afrique noire, p.392
[8] Tempels
[9] Henri Maurier, Philosophie de l’Afrique noire, Anthropos-Institut e.V, St Augustin, Bonn, 1985, p.138. 318p
[10] Ibid, p.140
[11] L. V. Thomas, Terre africaine et ses religions, Op. Cit. p. 42.
[12] Pierre Erny, L’enfant et son milieu en Afrique noire, L’Harmattan, Paris, 1987, p. 104 310p
[13] L. V. Thomas, Terre africaine et ses religions, Op. Cit. p. 38.
[14] Henry Maurier, Philosophie de l’Afrique noire, p. 191.
[15]L. V. Thomas, Terre africaine et ses religions, Op. Cit p. 55.
[16] Maurier Philosophie de l’Afrique noire, p. 155.
1 TEMPELS P., La philosophie bantoue, Paris, Présence africaine, 1949, p. 72.

2 AZOMBO-MENDA S. et MEYONGO, Précis de philosophie pour l’Afrique, éditions Fernand Nathan, 1981, p.54.
3 Idem.
4 SHEILA S. WALKER, Noms et identité chez les noirs américains. Article publié sur http://WWW.refer.sn/ethiopiques du 7 sept. 2OO8.
* Ce que nous avons nommé porte-malheur s’appelle wâzo chez les Bambara.
5 Azombo, Précis de philosophie pour l’Afrique, op. Cit., p. 58.
6 Idem, p.59.
7 Ibid, p.116.
8 Cf. Ibid., pp.119-121.
9 AZOMBO-MENDA S. et MEYONGO, Op. Cit., p.122.
10 Idem, p.125
11 NOTHOMB D., Un humanisme africain. Valeurs et pierres d’attente, Bruxelles, Edition Lumen Vitae, 1965 , p.89.
12 AZOMBO-MENDA S. et MEYONGO P., Op. Cit., 113.
[17] Maurier Philosophie de l’Afrique noire, p. 80.
[18] L.v.Thomas Terre africaine et ses religions, Op. Cit p. 27

dimanche 30 mai 2010

EXPOSE : ESTHETIQUE DE LA PAROLE

Par Richard NGOA
INTRODUCTION
En Afrique, la parole revêt une importance capitale car elle est l’instrument de communication le plus utilisé au point qu’on a pu parler d’une littérature orale africaine. Mais toute parole ne fait pas l’objet de l’esthétique car, en Afrique, la bonne parole n’est pas seulement esthétique, mais aussi éthique. La parole esthétique qui est l’objet de notre réflexion est celle qui respecte une certaine structuration, certains canons. Ainsi si l’esthétique traite du beau en général, l’esthétique négro-africaine quant à elle traite du beau et du bien/bon. Une parole esthétique sera celle qui obéira toujours à ces deux dimensions. Mais une autre dimension déborde les deux premières, et se situe au niveau métaphysique ; d’où l’expression de la transcendantalité. Devant cette conception de l’esthétique verbale, notre intelligence s’interroge : pourquoi cette double dimension esthético-éthique de la parole en Afrique noire ? Quelle est l’essence de la transcendantalité de la parole dans la culture négro-africaine ? Quelles peuvent en être les conséquences ? Voilà la problématique qui sous-tend notre réflexion. Ce sujet s’inscrit dans le but d’élargir l’orientation de l’esthétique sous d’autres thèmes, comme sa dimension métaphysique. Notre étude est un travail de réflexion et de synthèse à partir des sources de la tradition africaine aussi bien écrite qu’orale. Le dossier de notre recherche serait incomplet s’il n’avait le complément indispensable avec les foyers authentiques de notre culture. Pour nous y prendre, nous aurons une démarche analytico-herméneutique. Ainsi, nous parlerons d’abord de la dimension empirique de la parole, sa dimension esthético-éthique ; ensuite, nous présenterons sa dimension esthético-éthique ; enfin, nous montrerons sa triple dimension esthético-éthico-métaphysique, c’est-à-dire sa dimension transcendantale.
I LA DIMENSION EMPIRIQUE DE L’ESTHETIQUE DE LA PAROLE EN AFRIQUE.
Dans cette partie, nous traiterons de la rhétorique négro-africaine dans sa dimension esthético-éthico- éducative. Elle concerne la dimension constatative de la parole, pour parler comme AUSTIN.
I.1. La rhétorique africaine dans sa dimension esthétique.
Si la rhétorique peut se définir comme l’art de l’éloquence, l’art de bien parler, l’Africain a aussi forgé une rhétorique à partir des éléments langagiers de sa culture. Nous voulons donc dévoiler la manière dont se pratique la rhétorique dans les langues africaines. Il faut souligner que cette rhétorique n’est pas l’apanage de tout le monde, c’est toute une école par laquelle le rhéteur doit passer. Voici quelques préalables pour entrer dans l’esthétique de la parole :
I.1. Les préalables.
La respiration. Ici, il s’agit de la respiration phonatoire, celle qui prépare le rhéteur à entrer en scène. Il doit commencer par un exercice durant lequel il fait passer l’air à travers la bouche, les fosses nasales, le pharynx, le larynx, la trachée artère pour atteindre les bronches. Cette étape terminée, nous passons à la seconde.

La voix. Elle est le véhicule de la parole, dont les pièces maîtresses sont le larynx, siège des cordes vocales d’où naissent les sons. C’est la tension et la longueur des cordes vocales qui font vibrer l’air et déterminent la hauteur du son car les sons aigus portent mieux que les sons graves et sont plus intelligibles.
La diction. Elle concerne l’articulation et le débit. Pendant que l’articulation met l’accent sur la prononciation d’un mot pour ne pas créer de confusion, le débit quant à lui donne la mesure et la vitesse d’exécution auxquelles l’orateur est soumis.
L’intonation. Elle est le ton varié de la voix que l’on prend selon qu’on est fâché ou content, selon qu’on s’adresse aux enfants ou aux adultes, aux femmes ou aux hommes, ou aux deus sexes, en tenant compte du temps et de l’espace.
Voilà quelques conditions préliminaires que le rhéteur négro-africain doit respecter avant de s’engager dans son art locutoire.
I.1.2. L’acte locutionnaire.
C’est un acte où le locuteur produit des sons articulés, combine des mots selon des règles grammaticales ou syntaxiques et effectue une opération proprement sémantique en employant ces vocables dans un sens et avec une référence plus ou moins déterminés[1]. Ici, il s’agit d’obéir aux règles de rhétorique que la culture africaine a adoptées. Ce n’est qu’en suivant ces règles que l’on qualifie quelqu’un d’orateur. Il faut dire que la rhétorique négro-africaine connaît aussi des tournures aussi jolies et peut-être plus jolies que certaines langues occidentales ; à la seule différence que la rhétorique ici assume aussi une fonction éducative. Ces tournures obéissent à un emploi spatio-temporel et selon les personnes à qui on s’adresse. Essayons donc de découvrir ces tournures.
a. L’allitération.
Elle est surtout utilisée entre les jeunes de même âge qui ont subi l’initiation ensemble. Cela signifie qu’elle est un langage codé, cependant, les aînés peuvent l’utiliser voire les adultes pour passer un message en présence d’un étranger à qui on cache le message. Exemple :
•Entre les enfants de la même classe d’âge.
En éwondo, par exemple on dira :
Bë bebè bebè babebë bebebè bevog bebé mebëbë : littéralement : deux crapauds regardent les autres crapauds d’un mauvais regard.
En haussa, on dira :
« Kato na koto.
Kwado na koto.
Kato za ya kwace ma kato koto ?
Ce qui veut dire
Le gaillard broute (prend son repas).
Le crapaud aussi broute (mange).
Est-ce que c’est le crapaud qui va arracher au gaillard son plat ou bien c’est le gaillard qui va arracher au crapaud sa nourriture ? »[2]
L’auteur explique cette dernière tournure en ces termes : « Voilà un exemple d’un Karangina qui vise à prendre le candidat au piège de la confusion de la prononciation entre deux mots pourtant distincts dans leurs sens et leurs formes mais proches par certaines de leurs parties (…) On demande à un volontaire de le dire le plus rapidement possible. A ce niveau, aura certificat tout candidat n’ayant pas fait de confusion de prononciation entre kato, kwado, kwace et koto, qui ont des sonorités proches mais des significations différentes.[3]
Il en est de même pour la première tournure en éwondo. Ici, nous voyons que les préliminaires évoqués plus haut ressortent dans ce passage : la respiration, la diction, le débit. Nous remarquons qu’ici, il s’agit de prononcer rapidement les mots avec une orthophonie sans faille et d’une vitesse locutoire donnée par l’éducateur. Si l’enfant parvient à le faire, il commence déjà à tendre vers l’accession au titre d’orateur/rhéteur.
* Entre les adultes.
Entre les adultes, on peut utiliser les mêmes tournures mais à des fins différentes. Par exemple, si l’on veut dénoncer les attitudes de deux groupes de personnes qui vivent dans la haine l’un l’autre, on dira toujours :
Bebebè bebè bebë bebebè bevog bebé mebëbë.
Ici, on veut dévoiler les rapports de haine qui existent entre deux camps. Alors pour que les enfants ou l’étranger ne comprennent pas, on utilisera cette image pour désigner les personnes qui sont ici symbolisées par les crapauds. Donc si le chef demande comment vont telles personnes à l’égard de telles autres, si les relations sont celles de la haine on prononcera cette allitération et le chef comprendra que les deux camps sont dans la haine ; ainsi les enfants ou les étrangers comprendront juste les premières notions qu’on a mentionnées dans la première interprétation sans comprendre la seconde qui est plus parlante.
b- La gradation.
C’est une figure de style qui montre une évolution graduelle de la pensée dans une phrase. Elle est très récurrente dans la rhétorique négro-africaine et peut être utilisée pour exprimer la joie ou la tristesse. Ceci toujours en tenant compte de l’auditeur.
•Aux enfants.
La gradation dans l’esthétique négro-africaine amène l’enfant à s’exercer aux formules qu’il utilisera plus tard. On lui apprend à formuler lui-même des exemples de gradation à partir de son vocabulaire. Prenons l’exemple de cette gradation en éwondo :
Zaa di, zaa min, zaa ngeban ; ce qui veut dire en français :
Viens manger, viens consommer, viens engloutir.
Dans l’éducation, on voudrait montrer à l’enfant qu’il mange trop, qu’il mange comme un cochon ; et le plus souvent, quand il est avec ses égaux et qu’on le lui rappelle, il a honte et ne pourra plus manger comme un cochon, mais comme un homme.
* Aux adultes.
Employée envers les adultes, cette expression souligne plutôt une réprimande à la personne. Car en effet, le verbe est employé à l’impératif présent, cela suppose que non seulement celui qui t’appelle possède quel quelque chose que tu n’as pas, mais aussi il montre ton caractère improductif. C’est-à-dire que tu es inutile à la société puisque tu ne fais que consommer sans produire. En d’autres termes, le possesseur veut l’inviter au travail car pour manger, il faut produire ; et le plus souvent, de telles expressions finissent par une intrigue du type quand est-ce que toi tu m’appelleras pour venir manger chez toi ? Comme disent les gens de la rue « Chaque jour la main lave le pied, quand est-ce que le pied va laver la main ? »
Nous voyons donc que cette gradation comme toutes les autres figures de style ont une connotation esthético-éducative pour les enfants, et esthético-éthique pour les adultes. Ainsi, quand une femme veut accuser son mari devant ses frères sous prétexte que celui-ci ne produit pas mais consomme seulement, elle peut employer cette formule devant ses frères et ceux-ci comprendront que sa femme est en train de l’accuser d’être paresseux.
c- La métonymie.
C’est une figure de style qui consiste à désigner le tout par la partie. Elle est aussi beaucoup utiliser dans la rhétorique négro-africaine, mais surtout dans le sens de l’éducation et de l’éthique. Ainsi, une maman, pour montrer à ses enfants qu’ils ne vont pas mettre long au travail champêtre par exemple, ne leur dira pas tout de suite en éwondo :
Biayi ki tobo kuam a esyé. Ce qui signifie en français :
Nous n’allons pas mettre long au travail
Mais utilisera une formule rhétorique pour le dire avec beaucoup d’élégance en ces termes :
Biake fo tyé ve elog dzidzia, ce qui veut dire en français :
Nous allons arracher une seule herbe.
Ce qui est étonnant c’est que certains enfants qui ne comprennent pas encore cette tournure veulent l’appliquer à la lettre, et dès qu’ils arrivent au champ et qu’ils arrachent une seule herbe commencent à réclamer le retour au village. On utilise aussi les mêmes formules dans une dimension éthique pour les adultes.
Il en est ainsi pour toutes les autres figures de style. Nous avons choisi juste ces quelques figures pour attester que la rhétorique négro-africaine les utilise mais va au-delà de la simple esthétique pour aboutir à une dimension éducativo-éthique.
I.3. L’acte illocutionnaire.
L’acte illocutionnaire est un acte effectué en disant quelque chose dans la parole exercée. C’est un acte conventionnel qui ne dépend pas de l’intention du locuteur comme tel mais opère par les règles du discours lui-même. On remarque que cette partie illocutionnaire fait partie intégrant de l’esthétique de la parole dans la tradition africaine et s’exprime beaucoup plus par les mouvements du corps. Ecoutons ce que disent Louis-Vincent THOMAS et René LUNEAU :
«(..) il existe une véritable « éloquence » de certaines attitudes : ainsi, le balancement de la tête, le rythme harmonieux du corps deviennent les « parures de la parole ». L’index « doigt du silence » et le médius « beau parleur » par là même n’ont pas de bague ; en revanche l’annulaire, à la recherche de la parole de l’autre, le pouce (notamment chez le chef) « symbole de force », l’auriculaire « habile à trancher les débats » portent souvent chez les hommes des ornements qui sont les auxiliaires indispensables du verbe »[4]

Nous voyons clairement ici une autre face de qualification de l’esthétique de la parole en Afrique. C’est en respectant tous ces critères qu’on reconnait le véritable esthéticien de la parole dans la culture négro-africaine. Nos deux auteurs continuent en disant :
« Traditionnellement les langues africaines ne dépassent que rarement (elles n’en ressentent pas le besoin)le stade de l’oralité, et ce que l’Européen organise avant tout par la structure verbale, le Noir va donc l’exprimer tout autant par les gestes, le ton et le rythme, enfin par l’image et le symbole dont nous parlerons plus loin. – Le geste en soi s’avère expressif non seulement au niveau de la technique, du jeu intellectuel, mais encore sur le plan liturgique : l’apparente nonchalance du prêtre « animiste » masque mal un ritualisme rigoureusement codifié, inséparable d’un jeu de symbole et considéré comme condition nécessaire de l’efficacité religieuse : le geste ici se fait rite (…). En pays dogon les femmes tendent les bras en l’air pour indiquer leur tristesse ; elles raclent en frappant le sol avec une calebasse percée pour exprimer l’absurdité et le désordre de la mort. »[5]
Il est donc clair que les gestes constituent une part importante dans l’expression esthétique de la parole en Afrique. Sans s’arrêter à ce niveau, nos auteurs renchérissent :
«Les doigts restent unis, les coudes généralement se ramènent vers l’avant. De même les doigts joints sur la nuque expriment l’inquiétude, le souci grave. On sait également que lors de l’initiation, les « Le deuil s’exprime chez les Diola (Sénégal) par le geste que voici : garder les deux mains sur la tête, jeunes initiés demeureront étendus de tout leur long sur le sol ; quand ils se relèveront, « ils seront aux yeux de tous revêtus d’une dignité nouvelle. »[6]
Nous remarquons que nos auteurs commencent à récapituler presque tout ce qu’on a dit précédemment, à savoir les préliminaires : les circonstances, la tonalité, le rythme,… C’est cela qui constitue à première vue l’esthétique de la parole en Afrique. Si par exemple comme on vient de le voir, la femme diola ne respecte pas ces prescriptions que nous venons de citer quand elle est fâchée, elle ne sera pas considérée comme douée d’esthétique verbale. Cela nous conduit à découvrir une autre facette de la parole :
I.1.4. L’acte perlocutionnaire.
C’est un acte qui vise à produire un certain effet psychologique chez l’interlocuteur ou sur l’auditoire. Par son discours, un locuteur peut chercher à susciter l’approbation, l’admiration, la satisfaction, la crainte… Mais en Afrique tout cela se passe à deux niveaux et concerne aussi bien les enfants que les adultes. Cet acte perlocutoire peut s’exprimer par des contes, des proverbes, des légendes, des mythes,… bref tout ce qui peut susciter une certaine réaction de l’auditeur.
* L’acte perlocutoire envers les enfants.
Comme nous l’avons souligné plus haut, l’esthétique verbale négro-africaine est toujours accompagnée d’un message moral, éducatif ; il en est de même pour l’acte perlocutoire envers les enfants. On peut utiliser des contes, des fables des devinettes, des mythes, des légendes soit pour inciter l’enfant à suivre ou à ne pas suivre ce qui est vécu dans cet acte perlocutoire. Prenons quelques exemples.
Le conte. Il est un raisonnement métaphorisant du réel, un récit imagé qui reflète les réalités sociales. Il est un genre varié aussi bien dans sa forme, ses thèmes et son style que dans le message qu’il véhicule et il ne se raconte que la nuit, le plus souvent, ce sont les grands-parents qui disent les contes à leurs petits-fils pour les y initier. A leur tour, ceux-ci essayent de reproduire tous les contes qu’on leur a transmis. On distingue plusieurs types de contes : les contes de fée, les contes de guerre, les contes de chasseurs, les contes d’amour… mais nous n’allons choisir qu’un type pour l’illustrer, les contes d’initiation sexuelle. En voici un qui est racontés aux enfants. Il faut dire qu’avant de raconter, le locuteur suit une méthode tracée par la tradition pour rendre son conte crédible et plus esthétique. Il y a d’abord une formule introductive pour attirer l’attention de l’auditoire. Par exemple, en éwondo, on dira : Ndo anga bo naaaa, et l’assemblée répond hm, les Bassa diront ndon libon lè a, et l’assemblée répond éé C’est-à-dire : il était une fois, et l’assemblée réponde oui. Ce qu’on traduit dans le théâtre par cette formule : Awoulawoula et l’assemblée répond, awoula, et le locuteur reprend : histoire, et l’assemblée répond raconte. Puis suit le conte proprement dit parfois recoupé par des petits repons brefs sous forme de chants ; ensuite vient la formule finale qui, en éwondo, se dit de manière métaphorique et ceci pour passer la parole à un autre conteur dont on prononce le nom. Et cela se dit ainsi : Ai bisek ai miyiè, mevë (le nom de la personne à qui vous passez la parole.) Ce qui veut dire : et les poumons et les intestins, je les donne à (le nom de la personne). Et enfin vient la formule conclusive qui véhicule le message. Examinons donc ce conte d’initiation sexuelle chez les Maka de l’Est Cameroun qui a pour but de montrer comment solliciter l’amour d’une femme ou d’un homme dans le lit avec des paroles mielleuses sans la (le) blesser et sans que les non initiés comprennent.
« On avait demandé à Petit Papa de faire son travail.
Il était tout flapi, tout ratatiné.
On conclut qu’il était fatigué, qu’il dormait.
On l’effleura, on le secoua un peu pour qu’il se réveille et fasse son travail
Soudain, on le vit se redresser et hocher la tête.
Il gonfla, devint très fort et vigoureux.
Il acceptait de faire son travail.
Et on lui montra le travail à accomplir, et il le fit très bien et pendant longtemps.
Après, Petit Papa se fatigua, et il redevint tout faible, tout petit. »[7]
Ce conte a deux destinataires, mais pour le moment, on focalise notre attention sur la jeunesse. Un non initié comprendrait qu’on exhorte l’enfant à aimer le travail, mais aussi à bien le faire et à le faire jusqu’à la fin ; mais on lui montre qu’il sera fatigué et que c’est normale pour quelqu’un qui a bien fait son travail.
Mais si nous prenons le même conte et l’exprimons clairement comme cela se fait dans les camps d’initiation sexuelle, la portée sera celle-ci et de manière claire :
Petit Papa est un nom qu’on donne au pénis, et la femme, pour exprimer le besoin d’accouplement lui demandera de faire son travail c’est-à-dire de s’introduire dans son vagin. Comme le pénis ne se décontracte pas, la femme est obliger de le caresser pour le mettre en érection ; et soudain il se décontracte et l’acte sexuel commence. Ainsi, l’homme sera appelé à mettre longtemps sur la femme pour l’amener à jouir. Et après l’éjaculation, le pénis redevient flasque. Voilà le même conte exprimer à différentes personnes et dont le message diffère d’une catégorie à une autre. Pour un bon esthéticien de la parole, il procèdera de cette façon-là. C’est ce qui a amené Pierre ERNY à conclure que
« L’apparente immoralité qui règne dans les contes, expliquée au plan de la morale sociale comme type de conduite à éviter, devient au plan du symbolisme ésotérique victoire des forces de vie sur les forces de mort. Ceci explique que les contes puissent aussi devenir objet de croyance ; en un sens, ils sont doublement ésotériques. D’où leur portée métaphysique et sociale, perceptible au-delà de leur indigence littéraire. Leur récitation contribue à la marche du monde et à la mise en mouvement des grandes forces de la création ; elle est de ce fait hautement bénéfique. Sur le plan pédagogique, ils constituent une base d’enseignement, une première étape d’instruction, présentation aux jeunes, « sous une forme amusante et colorée, facile à retenir, les drames de la création et les connaissances qu’ils devront acquérir aux différentes étapes de leur initiation. Par la suite ces vérités essentielles se dégageront peu à peu des images enfantines et il suffira de les transposer pour entrevoir le fonctionnement du mécanisme cosmique. » »[8]
Le proverbe. Le proverbe est un énoncé qui ne porte pas de signification en soi, et son efficacité locutoire est extrinsèque, c’est-à-dire que l’expression figurée n’a pas de statut propre. Ces proverbes sont multiples et variés et sont énoncés selon les circonstances et les différentes activités de la vie. Un discours sans proverbe pour un adulte en Afrique n’a vraiment pas de sens à proprement parler. Un bon discours africain doit être assaisonné par des proverbes, des paraboles, des aphorismes, des anecdotes… Par exemple, pour exprimer une esthétique langagière polémologique, le chef de guerre ne va pas s’adresser à son adversaire de manière explicite, il pourra emprunter ce proverbe pygmée pour lui exprimer la vengeance de ses troupes en cas de fatalité de sa part : Si vous écrasez une fourmi, toutes les fourmis viendront vous mordre. L’éloquence ici se trouve dans la manière de dire. Il pouvait dire ouvertement, si vous m’attaquez, mes soldats me vengeront, mais il préfère prendre une autre tournure qui sonne très bien aux oreilles, telle est aussi l’esthétique verbale en Afrique noire.
NKOMBE OLEKO a étudié la relation interparémique, nous vous proposons de le lire. Mais notons que dans les proverbes, la parole est d’une nécessité existentielle. Est sage celui qui connaît les proverbes, ceux-ci étant le cheval de la parole. Tout en faisant l’usage de la parole l’homme devra se rendre compte qu’il ne doit pas tout dire : il est comme le fond de la pirogue de l’eau, c’est-à-dire il sait garder le secret des amis, se défendre de les dénuder. Et dans son expression, il doit se limiter à l’essentiel, éviter d’avoir une bouche comme le tambour, beaucoup de paroles mais peu d’actes. En effet, l’Africain est un homme de parole et il se sert des mythes, des récits étiologiques, des devinettes…pour exprimer non seulement la « pulchérie » de sa parole, mais aussi son message.

Il s’agit de montrer la manière dont les Africains utilisent l’esthétique dans la dimension éthique. Cette dimension concerne les différentes classes sociales auxquelles le locuteur s’adresse. La manière de parler du roi ou à un roi est différente de la manière de parler du guerrier ou à un guerrier, ou à un chasseur. Il faut toute une éthique de la communication que nous proposons vous livrer dans cette partie. Ceci parce que la parole nous vient de Dieu par l’entremise des ancêtres et elle ne doit pas être banalisée, d’où sa dimension transcendantale.
II. LA DIMENSION TRANSCENDANTALE DE L’ESTHETIQUE DE LA PAROLE EN AFRIQUE.
Dans cette partie, nous voulons montrer la partie performative de la parole qui nous vient de Dieu par l’intermédiaire des ancêtres. Mais il convient de préciser que l’art en général est une lutte de la vie contre la mort et symbolise eschatologiquement la victoire de la vie sur la mort. Car d’après les mythes africains, l’art a été créé pour nous rapprocher de Dieu, pour le garder présent avec nous car quand il était avec nous, il n’y avait pas d’art ; mais dès qu’il est allé s’installé dans son monde, nous sommes obligés de le chercher dans l’art à travers les ancêtres. Pour cela, il est important de lire le mythe des Guiziga sur Bumbulvung, le mythe écrit par Prosper ABEGA sur le « modo »…que nous n’aborderons pas ici.
II.1.Dieu comme essence de la parole.
En Afrique, l’efficacité de la parole repose sur la conformité à la volonté de Dieu à travers les ancêtres. En d’autres termes, pour qu’une parole soit efficace, c’est-à-dire pour qu’elle soit performative, qu’elle réalise ce qu’elle dit, il faut qu’elle prenne sa source des ancêtres qui vivent avec Dieu. Ici, nous abordons la dimension métaphysique de la parole. Dieu est à l’origine de la Parole et il est la parole. Cela signifie que dire la parole, c’est dire Dieu auquel je communie quand toutes les conditions sont respectées ; cela implique que la parole à dire ne puisse produire que des effets positifs car Dieu est bon et bonifie l’homme. Cela signifie que la parole dans cette dernière dimension récapitule tout ce qu’on a dit précédemment, elle contient en elle la dimension esthétique, éthique, métaphysique. Ici, celui qui profère la parole est connecté directement aux ancêtres, bref ce sont les ancêtres qui parlent à travers lui, comme le souligne Pierre ERNY :
« Un terme vaut par sa puissance d’évocation, par les notions avec lesquelles il peut être mis en relation, qui permettent d’en éclairer davantage la portée. Tout en restant apparemment dans le sensible et sans que l’image concrète soit transcendée, la pensée arrive de ce fait à se mouvoir à un haut niveau d’abstraction et d’universalité. »[9]
Nous voyons que la métaphysique est le summum de la Parole « pulchérique »• chez l’esthéticien africain. Voici ce que nous disent Louis-Vincent THOMAS et René LUNEAU :
« Si l’Africain accorde au verbe un tel pouvoir, c’est en raison de trois traits (…)-Tout d’abord parce qu’il renvoie à Dieu. La valeur du Verbe chez le Bambara du Mali par exemple provient de ses origines divines. « Dieu est par excellence la parole ; celle des hommes, reflet de la parole primordiale, conserve dans sa texture la trame originelle… D’une façon générale, Bemba est la raison d’être du Verbe, Faro en set la manifestation et la compréhension (la vue), Nyalé incarne son impulsion et sa diversité, N’domadyiri sa stabilisation et son explication. Chaque parole, chaque discours sont en quelque sorte la reproduction du langage de Dieu, aussi le Créateur et les trois « bases »façonnent ils à tout moment le verbe des hommes. »- Ensuite parce qu’il procède de l’homme, créature privilégiée par excellence. Si le verbe est chose divine, il n’en est pas moins, pour le Bambara par exemple, tout autant chose humaine. « Sans les transformations et le façonnage qui s’effectue à l’intérieur du laboratoire humain, il n’aurait pas acquis sa forme organisée ni produit dans le monde bambara les répercussions qu’on lui connaît. » Lié aux organes et sécrétions lui imprimant un nombre égal d’aspects différents, le langage a en outre des attaches particulières avec certaines parties ou postures du corps : les yeux renseignent sur la parole de celui qui parle, les oreilles permettent la maîtrise de la parole, le cou lui confère constance et hardiesse ; les pieds lui assurent la « masse » ou la solidité ; par ailleurs, lier les mains de celui qui parle, c’est amoindrir sa parole, la parole proférée debout reste superficielle ou vaine , mais parler assis (notamment s’il s’agit de décision grave) octroie au dire son poids et sa stabilité, etc.-Enfin parce qu’il n’est pas étranger au monde. Ne discerne-t-on pas dans la parole humaine, s’il faut en croire les Dogon (Mali), les éléments fondamentaux constitutifs du corps humains et que l’on retrouve dans le cosmos ? L’eau car sans salive pas de parole (la parole humide est celle « qui coule bien ») l’eau demeurant d’ailleurs « le support de la vibration sonore qui se meut selon une ligne hélicoïdale » ; la ligne de chevron représente simultanément « le chemin de l’eau et celui du verbe ». L’air puisque le poumon, à l’origine de la vibration sonore, « véhicule la vapeur d’eau chargée de sons ». La terre « qui donne à la parole son poids, sa signification », elle est le « sens des mots » ; correspondant au squelette dans le corps de l’homme, elle est la charpente du discours ». Quant au feu, il constitue « la chaleur de la parole » : l’homme en colère, dit-on, a une parole brûlante, l’homme calme une parole froide ! »[10]
Nous voyons donc la dimension métaphysique de la parole qui procède directement de Dieu, et c’est pour cela qu’elle est créatrice. Mais pour être véritable conséquente, cette parole doit passer par les ancêtres. Alors, qui sont les ancêtres pour les Africains ? Pourquoi les Africains les invoquent-ils ?
« Quelle que soit la terminologie employée, même dans le cas de la dialectique du verbe chez les Bambara, dont parle le professeur D. Zahan, ce cheminement est celui de la vie vers la conquête de son plein épanouissement (…)
Dans cette montée, c’est tout l’univers qui s’affranchit, s’unit, se personnalise et s’accomplit. Le rite africain est incompréhensible pour qui n’a pas cette dimension cosmique de l’homme. L’Homme est à la fois du monde des Vivants et de celui des Morts ; il est esprits, animaux, végétaux, minéraux ; il est feu, il est eau, il est terre.
II.2. Les Ancêtres comme intermédiaires entre Dieu et les hommes, le monde des vivants et celui des morts.
Le mot ancêtre vient de deux mots latins : ante qui signifie avant et cedere qui veut dire marcher. Généralement, les ancêtres sont considérés comme ceux qui ont vécu avant nous et qui ont marqué l’histoire de l’humanité mais qui sont déjà morts. Cela est vrai. Toutefois, pour l’Africain, l’ancêtre est plus que cela, il est un saint puisqu’il vit avec Dieu et intercède pour les Vivants ; c’est pour cela que tous les morts ne peuvent pas être déclarés Ancêtres comme le confirme le professeur B. MUZUNGU cité par Michel KOUAM :
« Tous les morts ne font pas partie des mânes… Les ancêtres sont les hommes qui ont bien vécu sur la terre, les hommes qui ont fait du bien… Ceux qui ont procréé… Ceux-là font partie des mânes. Les sorciers, les assassins, les menteurs, les voleurs… sont exclus de la catégorie des ancêtres et sont classés dans la catégorie mauvais esprits condamnés à errer et prêts à causer du tort aux vivants. »[11]
Il ressort de ce qui précède que l’ancêtre est quelqu’un qui a respecté les trois dimensions de l’esthétique de la parole : la dimension esthétique, la dimension éthique et la dimension métaphysique. Donc ici, il ne suffit pas seulement de bien parler, faudrait-il encore que ce que tu dis soit bien, vrai et utile à toute la communauté ; que cela soit conforme à ce que l’on fait. Ce n’est donc pas comme les simples rhéteurs ou les sophistes qui ne se souciaient pas de la vérité de ce qu’ils énoncent ; l’homme africain, pour être un véritable orateur, esthéticien, doit faire aboutir son discours dans sa dimension métaphysique ; comme le précise le professeur Michel KOUAM « La communion avec le monde invisible, pour être parfaite et totale, après la mort, exige une soumission à la loi morale capable de « sculpter » l’âme humaine. »[12]
La quintessence de ce passage nous fait comprendre que l’esthétique en Afrique reflète le mode de vie des ancêtres. Nous voyons là un véritable dépassement de la conception de l’esthétique occidentale. L’esthétique négro-africaine tire son essence de Dieu et des ancêtres. En d’autres termes, pour juger l’esthétique de la parole en Afrique, il faut interroger le vécu des ancêtres sinon tout jugement reste superficiel car il se limiterait au niveau des sens, pourtant il faut partir des sens pour atteindre l’essence afin que le jugement soit crédible, comme nous fait comprendre le professeur Michel KOUAM :
« Les règles de moralité pour l’éducation des hommes existent partout en Afrique, comme ailleurs, sous des formes diverses : dans les lois, dans les maximes à caractère proverbial. Mais elles existent surtout dans l’imitation des vies bien vécues : celle des aînés et surtout celle des ancêtres qui vivent en communion avec les vivants ; ces derniers constituent une instance de moralité du type théocentrique. Car ceux-là qui sont supposés avoir bien vécu une vie digne l’ont été dans la « crainte de Dieu ? ». A ce titre, ils sont des figures et des modèles à partir desquels leur progéniture doit forger et sculpter leur propre personnalité. »[13]
Nous voyons donc clairement ressorties les trois dimensions dialectiques de l’esthétique africaine : une dimension empirique qu’on qualifierait d’esthétique du premier degré commune à toutes les cultures du monde, une dimension empirico-éthique qu’ignore l’Occident ; enfin une dimension transcendantale d’ordre métaphysique qui est le sommet, le couronnement de toutes les autres dimensions avec pour finalité la recherche de la victoire de la vie sur la mort qui nous permettra de vivre éternellement avec Dieu et de devenir ancêtres à notre tour. Mais les véritables représentants des ancêtres sont les chefs ou les rois.
II.3. Le Chef ou le Roi.
Le Chef ou le Roi incarne les ancêtres, c’est pourquoi leur parole peut être soit bienfaisante, soit fatale quand il faut punir. L’autorité de leur parole découle du degré de leur fidélité à la volonté des ancêtres. Aussi quand le chef parle, il parle d’abord au nom des ancêtres, ensuite au nom de ses sujets. Il doit habiller sont langage de proverbes, de figures de style tels qu’on les a démontrés, et même sa tenue vestimentaire est tout un langage et doit obéir à certains canons. Il peut par exemple porter sur la tête des plumes d’oiseau, ou sur le tronc une peau de bête… et pour être plus considéré, il doit être accompagné d’un garde du corps qui est sensé mourir à sa place en cas d’attaque contre la personne du chef. Et quand le Chef ou le Roi parle, sa parole doit avoir un débit lent, il doit bien articuler les mots, il ne doit pas trop bouger les pieds, mais doit faire bouger les mains, son langage doit être un langage soutenu qui obéit à tous les préalables de l’esthétique mentionnés plus haut. Mais quand le chef conclut son discours, il le conclut par une tournure qui marque la fin des interventions. Il ressort de ce qui précède que les parole du Chef peuvent être « logothérapeutiques •» ou « logothanatosiques• » c’est-à-dire quelles peuvent soigner tout comme elles peuvent tuer car il parle au nom de Dieu et des ancêtres. C’est pourquoi Michel KOUAM souligne : « Partant du roi qui dégage une certaine conception de la vie en Afrique, l’homme est au centre d’un triangle dont le sommet est occupé par l’Être suprême, la bases d’un côté par les divinités protectrices de l’autre par les ancêtres. Le roi ou chef dans cette structure, est l’incarnation du pouvoir divin. »[14] Ainsi pour nommer la mort en Afrique, on procède par certaines attitudes qui font reconnaître le signe des différentes catégories de la société, comme le réitèrent L.V. THOMAS et R. LUNEAU :
« Voici à titre indicatif, l’exemple des Fon du Dahomey qui utilisent les formulent suivantes :
Mort du roi : Il fait nuit.
Mort d’un vénérable, d’un dignitaire : Sé (Principe transcendantal de la personne, le destin) lui a tendu la natte à lui
Mort d’un vieux non dignitaire : il est parti à la maison
Mort d’un jeune homme : la maladie a changé de main
Mort d’un enfant de quelques jours : il est retourné
Mort d’un jumeau dont l’autre survit : il est parti dans la forêt, etc. »[15]
Il est vrai que nous mettons l’accent sur la personne du Roi, mais nous remarquons que tous doivent savoir exprimer cette esthétique de la parole en des tournures différentes selon la mort des personnes concernées. Un bon esthéticien Africain doit aussi savoir employer le méta-langage comme le précise Pierre ERNY :
« Ainsi le Bambara va-t-il illustrer les thèmes le plus abstraits par l’entremise de l’éléphant, de l’hyène, de l’hippopotame, du cheval, de l’âne, du chien, de végétaux, de condiments, etc., choisis selon l’idée qui doit s’exprimer grâce à eux. Veut-il parler des « délices », et de la « saveur « de la connaissance ? Il fera intervenir le sel, le piment, la cendre, la sauce. S’efforce-t-il de dépeindre l’immensité du savoir ? Il aura recours à l’éléphant, l’animal le plus important de la faune connue de lui. Le lion incarnera l’aspect éducatif et noble de la formation. L’hyène figurera la connaissance objective, ramenée à la portée de l’homme. Ainsi de suite, chaque objet brut ou fabriqué, chaque être sont, dans l’enseignement, des symboles qu’il faut se garder cependant d’utiliser au hasard, car leur valeur est fonction de l’analogie susceptible ou non de s’établir entre ces concepts abstraits et les attributs réels et intrinsèques des supports des symboles. »[16]
Un bon discours d’un chef doit toujours être bien habillé par ce métalangage, cette éthique et cette métaphysique. Comme nous l’avons souligné avec le Docteur KOUAM, le pouvoir de la parole en Afrique part de Dieu pour atteindre les aînés. Les Ancêtres parlent au nom de Dieu, le Chef parle au nom des Ancêtres, Le chef de famille parle au nom du Chef de la contrée, le Premier-né parle au nom de son père et l’aîné parle au nom du premier-né. Nous comprenons que pour saisir la portée pulchérique de la parole en Afrique, il faut s’inscrire dans un chassé-croisé onomasiologico-sémasiologique ; en d’autre termes, pour saisir la parole, il faut d’abord saisir le mot ; et pour saisir l’idée, il faut comprendre l’expression. Sans cela, la compréhension du discours reste superficielle, comme le dit Engelbert MVENG :
« Voilà pourquoi, pour nous Africains, le monde même matériel, n’est pas une réalité impersonnelle : il est au contraire un partenaire avisé et efficace. On voit l’erreur d’optique de ceux qui ont interprété l’attitude de l’homme face au monde, dans notre tradition, en terme de fétichisme, idolâtrie, animisme. La médecine traditionnelle elle-même trouve ici sa véritable signification. C’est également là qu’il faut chercher les racines du langage symbolique. Ce langage à la fois scientifique (médecine) et esthétique (art), permet à l’homme de lire dans la création le grand livre de sa destinée. Il y déchiffre le nom de ses alliés et de ses adversaires dans le combat de la vie et de la mort. Il y mobilise ses alliés pour assurer la victoire de la vie sur la mort. »[17]
D’où l’importance de l’initiation dans la culture africaine, car celle-ci nous apprend que l’univers que nous récapitulons est un immense drame où s’affrontent la vie et la mort. Pour vaincre la mort, il faut passer par l’initiation qui est une étape rude. Ainsi tous ceux qui en sortent vivants expriment symboliquement la victoire de la vie sur la mort.
II.4. La performativité de la parole en Afrique.
Nous voulons montrer dans cette partie qu’en Afrique, la parole réalise ce qu’elle dit, c’est-à-dire qu’elle peut créer, vivifier et tuer selon les circonstances et les motifs, et cette performativité n’est pas conditionnée par le temps et l’espace ; en d’autre termes, il n’est pas nécessaire que le concerné soit toujours présent, même absent, la parole aura prise sur lui.
II.4.1. La « logotidzonie »•
En Afrique, c’est la parole qui a créé toutes choses, visibles et invisibles : elle est donc Dieu. Voici ce qu’en disent Louis –Vincent THOMAS et René LUNEAU : « La création du monde procède initialement du Verbe »[18] Dans la même verve, L.S.SENGHOR renchérit : « La parole, le Verbe sont l’expression par excellence de la force, de l’être dans sa plénitude (…) Chez l’existant, la parole est le souffle animé et animant l’orant ; elle possède une vertu magique, elle réalise la loi de participation et crée le nommé par sa vertu intrinsèque »[19] Nous retrouvons les même affirmations chez CHEIKH ANTA Diop, Théophile OBENGA, Grégoire BIYOGO. En fait, la parole crée dans les deux sens du terme : création réelle c’est-à-dire physique dans le sens d’appeler à l’existence, et création métaphysique dans le sens de mutation ontologique. C’est pourquoi la bénédiction ou la malédiction a prise sur quelqu’un sur qui on les profère.
II.4.2. La « logosodzonie »•/ Logothérapie.
Il convient de rappeler qu’en Afrique, la bénédiction émane des ancêtres. Leur mission première est de bénir les vivants. Cette bénédiction est donnée aux personnes ayant accompli de bonnes actions selon la volonté des ancêtres, de la communauté. C’est pourquoi à toutes les étapes de la vie, l’Africain implore la bénédiction des ancêtres : lors des semailles, des récoltes, de la chasse, de la pêche, du mariage, de la naissance, de la dation… Si les sollicitants de la bénédiction sont en état de pouvoir la recevoir, celle-ci agira efficacement et le sollicitant obtiendra ce qu’il a voulu. Ici, la parole agit ex opere operato et la personne bénie en ressent les effets. Cependant, il ne revient pas seulement au roi ou au chef de bénir, leurs substituts auxquels on a fait allusion peuvent le faire quand toutes les conditions sont réunies et les effets seront les mêmes.
II.4.3. La « logothanatosie »•
C’est la dimension fatale, meurtrière de la parole en Afrique, c’est la malédiction, une parole qui conduit à la mort. Il est utile de dire que la malédiction n’entre pas dans la volonté première des ancêtres. Mais si un imposteur devient une menace pour la survie du groupe, de la communauté, on peut demander aux ancêtres de le punir, de le maudire, ceci quand le roi ou le chef ou toute autre personne a déjà épuisé toutes les méthodes possibles pour le ramener sur le droit chemin. Comme nous l’avons dit plus haut, la malédiction n’est pas seulement au pouvoir du chef ou du roi ; toute personne peut la proférer pour vue que toutes les conditions soient réunies et que la personne à maudire soit vraiment coupable, sinon la malédiction n’aura pas d’effet car la personne concernée est aussi aimée des ancêtres qui veulent sa réussite dans la vie. La malédiction proférée envers une personne qui vit selon la volonté des ancêtres n’aura aucun effet. Voici ce qui est dit :
« Dans l’accomplissement de la parole mauvaise, outre l’ancêtre, le « ndoki (sorcier) » a également un rôle remarquable. C’est la raison pour laquelle il ne sied pas de souhaiter du mal à quelqu’un même par simple blague. S’il y a un « sorcier » aux environs, et qu’il saisisse la parole, il s’inscrit en agent réalisateur du mal exprimé é dans le verbe. Pour lui non plus la distance géographique ne joue pas : il peut atteindre l’intéressé n’importe quand et n’importe où dans un temps relativement bref. »[20]
Quoiqu’il en soit, ces trois dimensions métaphysiques de la parole en Afrique opèrent en dehors du temps et de l’espace. Leur performativité n’a pas besoin de la présence environnante du concerné. C’est pour cela qu’il est nécessaire d’avoir une certaine éthique langagière pour éviter les « logothanatosies ».
INTERETS PHILOSOPHICO- PEDAGOGIQUES DU SUJET.
Si nous convenons avec Wittgenstein que toute la philosophie se ramène aux problèmes de langage, il y a lieu de comprendre les controverses que l’Afrique a causées dans l’arène philosophique à propos de son langage qui n’avait pas été compris par les Occidentaux qui ont fini par nier l’existence d’une philosophie africaine, pourtant… De même, l’art africain ne peut être saisi que dans sa double dimension empirico-transcendantale pour pouvoir en parler avec orthodoxie. Comme nous l’avons dit plus haut, la beauté de la parole en Afrique se saisit dans une triple dimension esthético-éthico-métaphysique, ce qui est autre chose dans l’esthétique occidentale. Ceci montre que la philosophie doit être inculturée si elle veut être utile à un peuple quelconque car les catégories langagières et leurs significations ne sont pas toujours correspondantes d’une culture à une autre, d’où notre chassé-croisé onomasiologico-sémasiologique de la parole en Afrique, comme nous le raconte l’anthropologue Evans-Pritchard :
« J’ai lu quelque part que des missionnaires avaient essayé de traduire le mot « agneau » dans l’idiome des esquimaux, comme dans « paissez mes agneaux ». On peut, bien sûr, rendre cette phrase en se référant à quelque animal familier des Esquimaux, en disant par exemple « paissez mes phoques », mais on remplace ainsi ca qu’était un agneau pour un berger hébreu par ce qu’est un phoque pour un Esquimau. Comment peut-on communiquer le sens d’une phrase comme : les chevaux des Egyptiens sont « chair et non esprit » à une population qui n’a jamais vu le cheval et qui n’a aucune notion correspondant à l’idée que les Hébreux se faisaient de l’esprit. »[21]
En fait, cette remarque d’Evans-Pritchard nous interpelle aujourd’hui, nous Africains, car il est impératif pour nous d’endogéniser la philosophie, lui donner des concepts juste correspondant à nos catégories ; mais hélas ! On compte le nombre de philosophes qui acceptent l’existence d’une philosophie africaine. Aussi les mémoires ne portent que sur les philosophes occidentaux. Pour pourra donc faire connaître notre philosophie dans ce grand rendez-vous intellectuel. Il est étonnant que ce fut le révérend Père Tempels qui fut le premier à écrire une philosophie africaine ; et au grand étonnement des Africains qui en nient catégoriquement l’existence. Pourtant chaque philosophie part d’une donnée culturelle qui est la langue qui est porteuse de la culture. Nous sommes donc vivement interpelés par le Père HEBGA qui lance cet appel aux Africains :
« Puisse nos étudiants et autres chercheurs africains étudier les écrits de Plotin, Augustin, ceux de la philosophie éthiopienne (Abba Mikael, auteur du texte éthiopien du Livre des philosophes, La vie et les Maximes de Skandes, Le Traité de Zera Jacob). Ils réfléchiront sur l’énorme production philosophique africaine contemporaine, sans se laisser impressionner par la division arbitraire et superficielle des auteurs ethnophilosophes et europhilosophes. Ace propos, il faut affirmer que nombre de thèses de doctorat et de mémoires de maîtrise, de DEA sont dignes du plus grand intérêt. »[22]
Nous osons croire que cette invitation n’est pas tombée dans les oreilles des sourds. Il es aussi tant de nous réapproprier les éléments pédagogiques de notre tradition comme les proverbes, les contes, les devinettes, les mythes pour éduquer et instruire nos enfants. En prenant les exemples de sa culture, l’enfant comprend mieux les exemples car il les vit en direct. C’est aussi une interpellation qu’on adresse au ministre de l’éducation pour solliciter l’insertion effective de la culture africaine dans les programmes scolaires afin de former des Africains enracinés dans leur culture et ouverts au monde.
CONCLUSION.
L’esthétique de la parole dans la culture africaine : de l’empiricité à la transcendantalité, tel était le libellé qui nous a servi de réflexion. Aussi, pour une meilleure compréhension d ce sujet, nous avons soulevé une problématique qui a situé le sujet dans un domaine particulier, à savoir : Comment reconnaître les véritables canons de l’esthétique de la parole en Afrique ? Quelle est l’essence de la transcendantalité de la parole dans l’esthétique négro-africaine ? Quelles peuvent en être des conséquences ? Pour nous y prendre, nous avons adopté une démarche analytico-herméneutique. C’est ainsi que nous avons d’abord montré la dimension empirique de la parole en en faisant ressortir la rhétorique avec tous ses préliminaires. Nous nous sommes appesantir sur certaines figures de style et sur certains contes pour soutenir notre thèse ; Il en est ressorti que l’esthétique de la parole est toujours liée à une portée éducative. Ensuite, nous avons touché la partie concernant l’esthétique dans sa dimension éthique. Il a été évident que la véritable esthétique de la parole est toujours accompagnée de la dimension éthique. En fin, nous avons abordé la partie transcendantale de l’esthétique verbale dans laquelle nous avons montré qu’elle a son essence en Dieu en passant par les ancêtres. Aussi le Chef ou le Roi parle d’abord au nom de Dieu et des ancêtres avant de parler au nom du peuple dont il a la charge. Nous avons souligné la partie performative de cette parole en montrant qu’elle réalise ce qu’elle dit grâce aux ancêtres. Et enfin nous avons plaidé pour un engagement des Africains eux-mêmes à prendre l’avenir de la philosophie africaine en main, d’endogéniser la philosophie pour mieux la comprendre. Quoiqu’il en soit ainsi, il faut savoir que l’art en général a l’intention de vaincre la mort, et c’est pour cela que l’art africain exprime cette perpétuelle lutte entre la vie et la mort. La victoire n’est possible que si l’Africain vit comme ses ancêtres ont vécu. C’est pourquoi dans l’esthétique de la parole en Afrique, l’éthique sera de rigueur : interdiction de mentir même dans les divertissements, ce qu’on raconte pour amuser doit édifier l’homme, l’éduquer, l’élever, telle est la volonté de Dieu. Tout l’art en général et l’esthétique de la parole en particulier doit être métaphysicalisée si elle veut être validée. Il est aussi utile afin de pérenniser la culture africaine, de se réapproprier sa pédagogie à travers ses production en ce qui concerne l’éducation. Notre intention était donc de dégager, sans crainte d’y ajouter de notre cru, l’esthétique de la parole dans la culture africaine. Nous reconnaissons notre finitude épistémique quant à l’épuisement de sa portée interprétative et nous en appelons à des esprits mieux éclairés pour hisser sa compréhension plus haut pour le rayonnement de la philosophie africaine.


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-THOMAS Louis-Vincent et LUNEAU René, La terre africaine et ses religions, L’Harmattan, Paris, 1992, 334 pages.
-VAN HOUTE G., Proverbes africains : sagesse imagée, Kinshasa, 1976, 94 pages.







[1] Cf. Actes de la 4eme semaine philosophique de Kinshasa du 23au 24 avril, Langage et philosophie, 1979, P.102.
[2] Thomas Büttner, De l’idée au texte : Guide des auteurs, Niger, Editions Alpha, 2000, P. 133.
[3] Cf. Idem.
[4] L. V. THOMAS & R. LUNEAU, La terre africaine et ses religions, L’Harmattan, Paris, 1992, P.50.
[5] Id, P. 48.
[6] Ibid. P. 49-50.
[7] S.C. ABEGA, Contes d’Initiation Sexuelle, Editions Clé, Yaoundé, 1995, P. 81.
[8] P. ERNY, L’enfant et son milieu en Afrique noire, L’Harmattan, Paris, 1989, P. 174-175.
[9] P. ERNY Op. Cit. P. 185-186.
[10] L-V THOMAS&R. LUNEAU, Op.cit., P. 48-49.
•Puchérique vient de pulcher en latin qui signifie beau, nous l’utilisons ici faute de mieux pour dire l’adjectif qualificatif exprimant la beauté de la beauté.
[11] B. MUZUNGU cité par M. KOUAM, Esthétique II, Beauté et vie spirituelle, essai philosophique de confrontation : Plotin, St Augustin et l’Afrique, Editions Menaibuc, Paris, 2005, P.74.
[12] M. KOUAM, Op. Cit., P.148.
[13] Id., P. 75.
•Cette expression est notre création personnelle à partir de deux mots grecs : logos parole, et therapein, soigner, guérir : c’est donc une parole qui guérit.
•Même chose Logos, parole ; thanatos, mort c’est donc une parole qui conduit à la mort.
[14] Ibid., P.52.
[15] L. V. THOMAS & R. LUNEAU, Op. Cit. P ; 52.
[16] P. ERNY, Op. Cit., P. 186.
[17] E. MVENG, L’Afrique dans l’Eglise, Paroles d’un croyant, L’Harmattan, Paris, 1985, P. 13.
* Ce concept est issu de deux mots grecs : Logos=parole et ktidzein=créer. Nous l’utilisons pour montrer que la parole crée.
[18] L.V. THOMAS&R. LUNEAU, Op. Cit.P. 47.
[19] L.S.SENGHOR, cité par L.V. THOMAS &R. LUNEAU, Op Cit. P. 48.
•Concept créé par nous, dérivant de deux mots grecs : Logos=Parole et sodzein, therapein=sauver, guérir. Nous l’utilisons pour montrer que la parole peut sauver, guérir.
[20] Actes de la 4ème semaine de philosophie de Kinshasa, Op Cit. P. 293.
[21] E. AVANS –PRITCHARD, La religion des primitifs à travers les théories des anthropologues, Paris, Payot, 1971, P. 19.
[22] M. KOUAM, Op. Cit., P.16.